Le plein-feux


Considération historique


Jusqu'au 19ème siècle, l'éclairage n'était pas suffisamment développé pour permettre des effets dans les spectacles.

L'arrivée du gaz va représenter un progrès très net puisqu'on pouvait colorer ou jouer à volonté sur l'intensité.

Il faudra, cependant, attendre l'arrivée de l'électricité et l'invention du projecteur pour que la lumière ne soit plus un éclairage diffus

qui laisse voir (ou plutôt entrevoir) les décors en deux dimensions avec ombres peintes sur la toile, mais qu'elle devienne un partenaire

du spectacle, qui peut créer ou mettre l'accent sur tel ou tel élément de l'image scénique; produire l'illusion ou la démystifier, bref jouer un rôle actif.


Le problème sera de créer l'espace vital plus où moins lié à celui qui va l'habiter, le comédien. Un espace vivant, c'est un espace cohérent sans trous noirs involontaires, un espace riche, fondé sur les contrastes ou le jeu des ombres. Celà se fait en partant du pleins-feux.


Définition du pleins-feux


Le terme de pleins-feux peut avoir différents sens.


  1. Allumage à 100 % de tous les projecteurs

    On obtiendra le plus souvent, si les faisceaux sont croisés, une image brillante mais plate. Rien ne sera mis en relief, et le résultat ne peut être intéressant que si l'éclairagiste a déjà prévu une répartition des puissances entre les directions pour créer, malgré tout, une organisation. On peut imaginer alors quelle catastrophe donnera l'image si les faisceaux ne sont pas croisés.

  2. Egalisation absolue da la quantité de lumière

    Un plein feu peut aussi signifier une égalisation absolue de la quantité de lumière, demandée par les caméras de télévision, pour que le luxmètre ne varie pas lorsqu'on le déplace sur toute la largeur de la scène. On jouera avec les intensités des projecteurs de face pour rattraper ici, baisser un peu là, etc. Un grand travail avec les contre-jours aidera fortement à donner de la profondeur à l'image. Mais là encore, si le résultat est correct pour le petit écran, il manque de richesse pour la scène.

  3. Le plus beau pleins-feux

    Le meilleur pleins-feux qu'on trouvera au théâtre est celui où les lumières seront modulées pour créer un relief, tenant compte de la lumière clé, et faisant cependant que les choses soient brillantes: ceci sera plus clair, celà le sera moins à un moment donné du spectacle, et sera l'inverse cinq minutes plus tard, alors que le public n'aura rien vu bouger.


Or si le plein-feux est l'effet le plus difficile à réussir, c'est lorsqu'il en faut un, et un qui soit propre, que, semble-t-il, on cherche le moins à employer un éclairagiste. Entendu très souvent: « Je ne t'ai pas fait venir, il y avait qu'un pleins-feu qui bougeait quasiment pas »


Une expérience simple à réaliser peut faire comprendre l'importance des contrastes d'un éclairage vivant.

Si dans le noir on allume un briquet, petite flamme vacillante, près d'un visage, hormis la chaleur, l'oeil sera attiré par ce visage éclairé et ne verra que lui.

Le même briquet, même flamme vacillante, près du même visage, mais en pleine lumière, ne produira plus d tout le même effet... et l'oeil du spectateur verra ce qu'il a envie de regarder...

De même un comédien, éclairé par un projecteur sur une scène toute noire focalisera complètement l'attention du public sur lui. Si la scène et éclairée en pleins-feux, ce sera déjà beaucoup plus difficile et il faudra concentrer sur ce comédien un ou plusieurs projecteurs beaucoup plus puissants. C'est le principe de la poursuite.

C'est pourquoi, il faut s'arranger , lorsqu'on règle un éclairage dans un jeux des rideaux noirs, pour ne pas faire baver la lumière des projecteurs sur ces rideaux – fond ou côtés -, pour laisser exister la nuit autour du plateau, le comédien en sort grandi.


La méthode américaine


Prenons un personnage, ou deux, en train de bavarder. Plaçons-les au milieu de l'avant-scène. Comment les éclairer ?

L'angle intéressant, pris à la hauteur des yeux et des épaules, variera de 35 à 60°, l'idéal se situant vers 45°, c'est-à-dire l'angle des architectes, celui de la perspective.

ATTENTION aux yeux !!! Une lumière trop verticale (douche) enfonce les yeux, entraîne des ombres très dures qui déforment le visage, cachent le regard. Un chapeau à visière (melon, cow-boy), même avec un angle d'éclairage normal, présente une difficulté particulière dont l'éclairagiste risque d'avoir à s'entretenir avec la costumière.


Le quadrillage


Revenons à nos comédiens ci-dessus. Pour donner un visage agréable, placer un projecteur à 45° sur le côté ; un deuxième projecteur, symétrique au premier, permettra l'équilibre et donnera ce qu'on peut appeler la richesse de la lumière. Impression psychologique ou phénomène physique réel, un projecteur de face paraît donner une lumière terne. Deux projecteurs croisés rendent une impression plus lumineuse, plus brillante. Il faut entendre par deux faisceaux croisés sur un point quelconque de la scène, deux projecteurs venant l'un plus de la cour, l'autre plus du jardin.



Plantation pour un plein feux Deux projecteurs par zone




Si les deux projecteurs sont à la même intensité,il n'en ressort rien. Même avec cette lumière riche. Avec nos projecteurs symétriques il faudra assymétriser la lumière. Comment faire ;

  1. Placer les projecteurs au bons endroits

  2. Créer des différences

Voilà nos personnages de l'avant-scène à peu près correctement éclairés. Le problème va donc consister à faire en sorte qu'ils restent éclairés tout en se déplaçant sur le plateau tout entier.


La Méthode


La solution qu'on appelle la « Méthode » avec un M majuscule nous vient du professeur MacEndless.

Il suffit de réaliser, par un jeu de quadrillage adapté au décor et aux dimensions du plateau, ce que l'on a réalisé plus haut, sur un seul carré autour des comédiens.


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